L’extension de la scolarité aux groupes sociaux qui en étaient jadis exclus est l’un des phénomènes les plus frappants de l’histoire moderne. L’éducation de masse constitue l’un des principaux fondements de la croissance économique. La foi dans le pouvoir merveilleux de l’enseignement est l’une des composantes les plus durables du progressisme. Pourtant la démocratisation de l’enseignement n’a pas accompli grand-chose qui justifie cette foi. Elle n’a ni permis au peuple dans son ensemble de mieux comprendre la société moderne, ni amélioré la qualité de la culture populaire. En revanche elle a contribué au déclin de la pensée critique et l’abaissement des niveaux intellectuels.
L’éducation de masse et comme les conformistes l’ont toujours affirmé n’est pas compatible avec le maintien d’un enseignement de qualité. Dans la société moderne, l’école sert surtout à former les gens à travailler, or la plupart des professions même à des niveaux de rémunération élevées, n’exigent plus un haut niveau de compétence technique ou intellectuelle. Elles sont principalement une routine et demandent si peu d’initiatives et d’esprit inventif que quiconque réussit les études appropriées se trouve surqualifié par rapport à la plupart des postes disponibles.
On voit que la détérioration du système d’éducation reflète des conditions sociales ou l’initiative, l’esprit d’entreprise et le besoin psychologique de réussir ne sont plus de mise. Contrairement aux affirmations de la plupart des théoriciens de l’éducation et de leurs alliés des sciences humaines, la société industrielle ne repose plus sur une population conditionnée à désirer la réussite. Elle exige plutôt un peuple abruti, résigné à effectuer un travail sans intérêt et de mauvaise qualité et disposé à ne chercher satisfaction que dans les heures consacrées aux loisirs !
Sources : « La culture du narcissisme de Christopher LASCH